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25 ans d’Histoire : France Libertés a soutenu le peuple kurde

06.05.2011


danielle_kurde.pngNous voulions remercier le photographe ABED ABIDAT pour son exposition GENERATIONS KURDES qui sera mise en avant pour les 25 ans de la fondation.

France Libertés a été l’une des premières organisations à dénoncer le sort tragique de ces populations, nous étions présents dès 1986 avec Michel Bourdon (Président de Sherpa et avocat international spécialisé dans les Droits de l’Homme) pour soutenir Medhi Zana, le maire de Diyarbakir (Turquie) condamné à 14 ans de prison pour avoir prononcé un discours en kurde alors que la langue et le nom même de « Kurde » étaient sous le sceau d’une interdiction d’utilisation.

En 1988, pendant la guerre entre l’Irak et l’Iran, la population kurde est prise entre deux feux. Saddam Hussein ordonne alors une attaque au gaz sur la ville d’Halabja puis sur les autres régions du Kurdistan, la population fuit vers la Turquie. Une fois sur place, les 38 000 rescapés sont parqués dans des camps de réfugiés où les conditions de vie sont dramatiques.

C’est là qu’en mai 1989 dans les camps de Mardin, Diyarbekir et Mush, dans la partie à majorité kurde de Turquie, Danielle Mitterrand, présidente de France Libertés, a rencontré ces réfugiés et des personnalités kurdes telles que le dramaturge Musa Anter, condamné à plusieurs reprises pour ses écrits en langue kurde.

Emue de leur détresse et de leurs conditions de vie inacceptables, en revenant en France, elle prend fait et cause pour ce peuple et essaye d’impliquer le gouvernement pour défendre leurs droits. Suite à son engagement et face à sa détermination, une partie des réfugiés sera finalement accueillie dans l’hexagone.

Fin avril 1991, Danielle Mitterrand se rend au Kurdistan iranien, elle y découvre alors selon ses propres mots « un peuple sur les chemins d’exode, fuyant les persécutions et les armées de Saddam Hussein. ». Après avoir traversé des champs de mines, elle franchit alors illégalement la frontière irakienne à Haj Omaran, pour rencontrer Massoud Barzani et les autres dirigeants de la résistance kurde à l’oppression de Saddam Hussein. Une rencontre unique qui l’a convaincue que son action en faveur de ce peuple martyr est juste et doit prendre de l’ampleur.

Danielle Mitterrand par l’intermédiaire de sa fondation France Libertés pousse donc la France à jouer un vrai rôle pour faire adopter par le Conseil de Sécurité des Nations Unies la résolution 688. Dans un contexte régional particulièrement instable, elle constitue la base juridique de la création d’une zone de protection et d’exclusion aérienne au Kurdistan irakien. C’était la première fois dans l’histoire de l’ONU, qu’une résolution faisait mention du peuple kurde.

En juillet 1992, se tient donc le premier parlement autonome kurde dans cette zone en Irak sous protection internationale et dont Danielle Mitterrand fait l’ouverture. 

De 1994 à 1997, face aux divisions internes et aux rivalités entre les partisans de Massoud Barzani et de son frère de lutte : Jalal Talabani, Danielle Mitterrand refuse de revoir les dirigeants, qui se décrivent comme « ses fils », tant qu’ils ne seront pas réunis autour de la table.

Puis en 1997, les deux représentants de l’Etat autonome Kurde d’Irak viennent voir Danielle Mitterrand à Paris, dans son bureau, main dans la main. Le temps de la réconciliation est venu et le travail peut reprendre dans le bon sens.

Depuis 1997, nous avons continué à mener plusieurs actions de dénonciation ou de sensibilisation. Partout où nous pouvions faire entendre notre voix et la leur, nous avons pris le temps de plaider, à l’ONU bien sûr, mais aussi auprès du congrès américain autant que devant la commission européenne.

Le travail n’a pas manqué, nous avons soutenu les prisonniers d’opinion kurdes en Turquie ou en Iran, notamment les parlementaires kurdes détenus abusivement en Turquie. Nous avons aussi tenu à toujours fournir une information au grand public en France, c’est pourquoi France Libertés a participé régulièrement (et participe encore) à des films, des projections, des débats et des expositions.

En parallèle de ce travail de sensibilisation et sur le terrain et en accord avec les modes de fonctionnement de la fondation, nous avons mené sur le terrain des projets humanitaires comme la reconstruction de villages, de services hospitaliers, de centres de rétention de jeunes délinquants, nous avons formé des professeurs et nous avons construit sur le territoire autonome du Kurdistan d’Irak plus de 600 écoles de 6 à 12 classes. Un des plus gros projets de la Fondation !

C’est donc parce qu’elle a joué un rôle de premier plan dans le choix d’une solution pacifique et politique pour ce peuple kurde persécutée que Danielle Mitterrand représente pour eux « la mère des Kurdes ».

En 2002, lors d’un discours devant l’institut kurde de Paris Danielle Mitterrand expliquait :
«  Cependant, il reste tant de choses à faire. Tous les Kurdes du Kurdistan en Irak, ne bénéficient pas de l’autonomie de fait. Ceux qui vivent dans les villes pétrolifères laissées au contrôle de Bagdad, s’ils ne renoncent pas à leur identité, sont persécutés, déportés, ou expulsés. Ils sont des milliers à vivre dans des camps de fortune aménagés par les autorités kurdes dans l’attente d’être logés dans de nombreux logements en construction, que j’ai vu le long des routes au Kurdistan. »

En 2009, elle fut l’une des principales invitées d’honneur lors d’une session du parlement du Kurdistan autonome d’Irak et expliquait alors « J’ai entendu dire que certains proposeraient de transformer le Kurdistan en Dubaï ou Qatar. J’ignore si cette perspective est réaliste. Mais en tout cas ce serait bien dommage de vouloir faire de ce pays de haute culture, qui fut l’un des berceaux de la civilisation humaine, un émirat pétrolier rentier et consumériste. Votre peuple y perdrait son âme et son identité. Je rêve pour ma part pour le Kurdistan d’un modèle de développement durable juste et solidaire. Vous avez la chance d’habiter des terres fertiles, de disposer des ressources en eau relativement abondantes. L’agriculture et l’élevage qui pendant des millénaires ont fait la richesse de la haute Mésopotamie semblent aujourd’hui à l’abandon. Et c’est bien dommage. L’autosuffisance alimentaire est la base de la survie d’un peuple. L’eau est une richesse beaucoup plus importante que le pétrole. Car l’humanité a pu vivre sans le pétrole pendant des millénaires mais elle ne peut survivre sans l’eau. ».

C’est dans tous ses discours que l’on retrouve le réel sens de l’action de France Libertés pour le peuple kurde.

C’est d’ailleurs lors de ce voyage de 2009 que le présidente de France Libertés a pu constater l’importance de la reconnaissance du peuple kurde à son égard : une école portant son nom a été inaugurée par Delshad Abdoulrahman, le ministre de l'Education du Kurdhistan autonome d’Irak. Il affirma alors que cet établissement « exprime la fidélité du peuple kurde envers la veuve de l'ancien président pour la défense de nos droits ».

Aujourd’hui, même si les difficultés ont évolué, elles sont encore nombreuses et France Libertés continue d’apporter son soutien au peuple kurde. La Fondation est membre de la Coordination de solidarité avec le peuple kurde, collectif d’associations françaises et kurdes, représentatives des toutes les parties du Kurdistan, soutenue par des personnalités et des intellectuels.

Cette organisation tente de promouvoir un règlement pacifique de la question kurde. Mais dans les faits, elle se heurte à une répression violente et armée sur l’ensemble des territoires, et notamment en Turquie, grâce à des armes vendues par le vieux continent.  Ce collectif demande donc régulièrement que les ventes d’armes par la France autant que par le reste de l’Europe aux gouvernements concernés soient interdites.

En 2011, les relations de France Libertés avec le peuple kurde sont désormais passées sur un autre plan. Le Kurdistan a réussi à faire reconnaître son autorité sur un territoire et respecter son identité en Irak. Aujourd’hui ce gouvernement a des relations diplomatiques avec de nombreux pays dans le monde.

De nos jours, cette province essaye d’être exemplaire dans la région, sans avoir une volonté de réunir l’ensemble du peuple kurde, elle essaye de se poser en caution morale pour la défense des Droits Humains dans le monde. Le gouvernement organise régulièrement des conférences, notamment pour défendre les Chrétiens d’Irak, mais pour prendre position et partager son expérience. Ils multiplient les actions de plaidoyer et de sensibilisation sur tous les sujets qui touchent à l’atteinte aux droits, à l’accès à l’eau entre autres.

France Libertés ne finance plus d’infrastructure comme il y a quelques années mais parraine ainsi un partenariat entre Léo Lagrange et le ministère de l’Education kurde pour former des intervenants et des formateurs sur les questions de jeunesse.

Nous avons aussi encouragé un échange entre le gouvernement d’Erbil (Capitale du Kurdistan irakien) et l’association Sherpa pour mettre en place un dispositif d’initiation à la législation internationale sur les Droits de l’Homme.

Enfin en 2012, le gouvernement kurde sera officiellement présent à l’invitation de la Fondation pour le Forum Alternatif Mondial de l’Eau.