Commémoration de la mémoire de Danielle Mitterrand:  » Sur les pas de Danielle, aux Pays-Bas « 

Voici 3 ans que Danielle Mitterrand nous a quittés.
Mais son œuvre, ses idées, le chemin qu’elle a tracé pendant de longues années de combat pour défendre les droits des opprimés ont continué de vivre à travers celles et ceux qui l’aiment dans le monde entier.

Parmi eux, les Iraniens réfugiés aux Pays-Bas. Constitués en association de sympathisants du Conseil National de la Résistance Iranienne ( CNRI ),  ils ont décidé de lui rendre un hommage solennel à La Haye pour son amitié et sa solidarité de plus de 30 ans a l'égard du peuple iranien dans  sa lutte pour la démocratie, les libertés fondamentales, et sa résistance face à la tyrannie et à  l'oppression.

Résistance, ce mot si cher à Danielle  qui a forgé une partie de sa jeunesse , c'était son trait d'union avec le mouvement dirigé par Maryam Radjavi qu'elle a toujours soutenue dans les moments les plus difficiles, en particulier quand la politique de complaisance des États Occidentaux vis-à-vis du pouvoir théocratique et fanatique en Iran préférait sacrifier les Droits Humains sur l'autel des intérêts commerciaux et autres calculs diplomatiques.

Elle n'a jamais oublié les exilés – résidents du camp d'Ashraf ( Irak ) aujourd'hui transférés au camp Liberty , victimes de massacres et de persécutions à de nombreuses reprises , bien que sous protection internationale.

C'est pourquoi, à notre tour , nous ne pouvons oublier de réclamer haut et fort les responsabilités de l'ONU, des Etats-Unis et de l'UE pour les protéger et faire pression sur l'Irak afin de garantir leur sécurité et lever les différents blocus ( dont médical) qui leurs sont imposés.

Elle n'a jamais oublié non plus la guerre des mots quand la justice se fait instrumenter pour qualifier de " terrorisme " ce qui relève de la Résistance.

De nombreux intervenants répondant à l'invitation du " Groupe Hollandais des Amis d'un Iran Libre ", personnalités politiques, militants des Droits de l'Homme , et amis Iraniens ont rappelé ces combats indissociables de la mémoire de Danielle Mitterrand à laquelle ils ont rendu un chaleureux hommage.

C'était un 22 Novembre, en présence de la Fondation France-Libertés, de son Président Gilbert Mitterrand et de sa famille.

Intervention de Gilbert Mitterrand le samedi 22 novemnre 2014, Commémoration de la  mémoire de Danielle Mitterrand

En ce 22 Novembre , je veux surtout  remercier  " les Amis de la Liberté en Iran "et le CNRI  de l'organisation de ce rassemblement , aux Pays-Bas , en mémoire de ma mère Danielle Mitterrand , décédée il y a 3 ans, jour pour jour.
Ma famille, la Fondation France-Libertes, et moi-même sommes très sensibles et très touchés de votre initiative et de votre invitation.

Évoquer sa mémoire, c'est d'abord évoquer celle de ses parents , instituteurs de l'école publique au début des années 1900 , c'est à dire au moment de la loi de Séparation de l'Eglise et de l'Etat en France.
Le combat de l'Ecole Publique était celui du combat pour la République .
Danielle Mitterrand est née dans une famille pour qui les mots de Liberté, Égalité, Fraternité, Laïcité, Tolérance, Respect , ont forgé son univers. C'était son éducation.

Elle avait 16 ans lorsque le fascisme et le nazisme voulurent imposer un autre univers.

Cette épreuve lui fit découvrir l'Engagement , l'engagement personnel , au quotidien , pour refuser , combattre , et Résister à ce qui est inacceptable , inconcevable.

Elle en conçoit un refus viscéral de toute idéologie , de toute philosophie , de toute croyance , de toute politique , qui pour asseoir sa domination  a pour conséquence , sous quelque forme que ce soit , de nier la vie d'autrui , d'asservir , de porter atteinte à l'intégrité  des personnes , de les priver ou de ne pas leur permettre d'accéder aux droits fondamentaux qui leur  permettent de vivre  et de vivre dans la dignité .

" la petite fille que j'étais s'est forgée avec pour seule loi la résistance à tout ce qui me choque m'indigne et me révolte. Alors oui, la résistance fut mon camp . Terroriste pour certains, mais décorée de la Médaille de la Résistance au sortir de la guerre, je savais que mon chemin me conduirait inéluctablement à dénoncer les atteintes à l'intégrité de la vie et de la dignité. " ( citation ).

Ce sera le 1er pilier fondamental de la création de la Fondation France-Libertes , il y a près de 30 ans :

" Mener des actions de plaidoyer et de témoignage contribuant à l'émergence et au renforcement des libertés individuelles et collectives dans le monde , et aider celles et ceux qui agissent a cette fin " est la rédaction de l'article 1 de ses statuts.

Cela passera par le soutien aux peuples autochtones , aux minorités opprimées , aux peuples non représentés par leurs États , privés de leurs droits , de leur richesse , et  parfois même de leur vie.
On se rappellera , entre autres ,des terrains de luttes en Afrique du Sud, au Tibet , en Amérique Latine ( amérindiens), au Sahara Occidental , au Cambodge, au Kurdistan …

Écouter,  plaider, soutenir, interpeller,  dénoncer ,  refuser,  résister, sont au cœur de l'engagement de sa Fondation , contre l'oppression, la domination destructrice, et la privation des Droits Fondamentaux.

Aujourd'hui, des hommes , des femmes, des enfants  meurent en Iran.  Ils sont  opposants au régime des mollahs . C'est l'un de ces peuples les plus opprimés dans leur propre pays. Certains sont en exil en Irak.

Au cours des 8 dernières années, ces réfugiés ont été la cible de 26 attaques conduisant à plus de 115 morts et 1.300 blessés.
Ils sont pourtant sous protection de la Communauté Internationale,  dans le cadre du Droit International , et sont  résidents du Camp Liberty.

Il est inadmissible que perdure un blocus du camp, y compris  médical  et le non- transfert de patients vers les hôpitaux de Bagdad;

Il est inadmissible que perdure une restriction d'accès à l'énergie – source de production de services, d'hygiène, de fonctions sanitaires vitales, d'accès à l'eau potable pour tous;

il est inadmissible que des hommes, des femmes, des enfants , déjà victimes de l'exil , continuent à mourir et à souffrir alors qu'ils sont sous la protection de la Communauté Internationale.

Les Principes fondamentaux qui gouvernent notre humanité ne sont pas marchandables et ne peuvent être sacrifiés à d'autres intérêts ou considérations économiques, énergétiques ou nucléaires , ni même de tout autre nature.

France-Libertés , avec d'autres ONG  , a soumis une Déclaration écrite rendue publique dans le cadre de la session du Conseil des Droits de l'Homme au mois de septembre dernier afin d'alerter, de plaider, et d'interpeller les garants de leurs droits, de leur protection, et de leurs vies , sur une situation qui perdure malgré nos appels répétés .

Cette situation qui perdure n'est pas à démontrer. Elle est établie et reconnue par le HCR et le Conseil des Droits de l'Homme.

Les combats semblent parfois désespérés, mais chaque victoire montre que ceux qui les mènent , souvent au prix de leur vie, ouvrent les chemins.

La rencontre de France-Libertes et de la Résistance Iranienne date de 1984, entre Danielle Mitterrand et Massoud Radjavi . C'était quelques temps après que la France , par décision de son Président Francois Mitterrand, en juillet 1981, eut accordé l'asile politique à la résistance iranienne sur notre territoire, à  Auvers/Oise.

De nombreuses épreuves consolidèrent le lien entre la Fondation et la résistance iranienne au cours de ces décennies, et ces combats rapprochèrent intensément Maryam Radjavi et Danielle Mitterrand.

Ce fut encore le cas  à l'occasion de la rafle d'Auvers/Oise en 2003 , et l'incarcération de Maryam Radjavi ,  lorsque la justice française fut instrumentée par le gouvernement d'alors afin de mettre fin à une organisation  " terroriste " . Il s'agissait surtout de donner des gages à l'Iran qui le demandait en contrepartie d'énigmatiques marchés.

 Il aura fallu 14 ans de procédure , de grèves de la faim , de souffrance , de drames ( immolation par le feu ), de désespoir,   depuis cet assaut hyper médiatisé d'Auvers pour que l'affront soit enfin  levé, l'honneur rendu, la dignité et la légitimité du combat de la Résistance Iranienne établies et reconnues  par la Justice Française, pour  que la Résistance Iranienne porte bien son nom de Résistance.

Maryam Radjavi disait de Danielle Mitterrand qu'elle était " le vrai visage de la France, résistante de la première heure contre l'infamie fasciste des nazis, et aux côtés des opprimés du monde."

Aujourd'hui, en ce 3 ème anniversaire de la disparition de Danielle Mitterrand , c'est elle qui prononcerait ces mots a l'égard de Maryam et du mouvement pour la Liberté que vous incarnez.

La Fondation fait corps avec votre combat et le CNRI  pour la Liberté, pour les droits fondamentaux des citoyens d'Iran dans un Pays libre et démocratique, pour une adhésion à la Déclaration universelle des Droits de l'Homme et aux conventions qui s'y rapportent.

La Fondation fait corps avec votre combat et le CNRI  qui revendique  une séparation du pouvoir religieux et du pouvoir politique, la liberté de culte, le droit des femmes, et la reconnaissance des droits de toutes les minorités ethniques et nationales.

La rencontre de la Fondation et de la Résistance iranienne se situe, au plan humain, sur le devoir immédiat de sauver des vies et de protéger l'intégrité d'un peuple qui souffre sous le joug d'une dictature fanatisée, mais la rencontre est aussi, au rang des valeurs, notre  soutien à  l'émergence d'un modèle de gouvernance libre, démocratique et laïc, respectueux et protecteur  des Droits humains fondamentaux.

C'est votre combat contre le régime des mollahs, et c'est un  modèle dans cette partie du monde, un exemple pour un chemin annonciateur d'une Paix à laquelle de nombreux peuples aspirent autour de vous.

Avec vous, il sera possible de bâtir ce monde libre qu'il faut simplement veiller à ce qu'il soit plus humain dans son développement , c'est à dire  plus juste et solidaire .

Cela, c'est  le 2 ème pilier de l'engagement de la Fondation France-Libertes que nous développerons le moment venu, car rien n'est possible sans d'abord vivre, et vivre libre.

Gilbert Mitterrand