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L’extractivisme un modèle d’exploitation intensive des ressources naturelles

Par industries extractives France Libertés entend toutes les activités qui touchent à l’extraction de produits minéraux présents à l’état naturel sous forme solide, liquide ou gazeuse, ce qui inclut à la fois les minerais, les hydrocarbures et les gaz. Les mines à ciel ouvert ou les forages de gaz de schiste en sont des illustrations concrètes.

L’extractivisme désigne un modèle d’exploitation des ressources naturelles, basé sur l’excès, pour répondre aux besoins croissants de nos sociétés de surconsommation. Il repose sur  l’idée d’une quête sans fin ni limites des matières premières, dont la raréfaction liée à leur surexploitation implique d’aller les chercher toujours plus loin, plus profond et d’employer des techniques toujours plus invasives et dangereuses pour la santé et l’environnement. Il repose également sur la captation d’une grande quantité de ressources pour faire fonctionner ses activités, notamment l’eau. Ces pratiques génèrent toujours plus de gaz à effet de serre et bouleversent le cycle de l’eau, aggravant ainsi toujours plus la crise climatique.

Parce qu’il décrit un système, l’extractivisme désigne également, au sens large, toutes les pratiques d’exploitation des ressources naturelles à outrance orientées vers une économie globale déconnectée des réalités locales (comme les monocultures de taille industrielles et les grands barrages hydroélectriques). Par extension, parler d’extractivisme c’est également parler des infrastructures et aménagements que ces grands projets impliquent : déforestation massive, autoroutes traversant des espaces naturels protégés ou des territoires autochtones dans le seul but d’acheminer les matières extraites vers leur port d’exportation, etc.

Des conséquences multiples désastreuses pour l’environnement et les peuples

L’extractivisme génère un cortège de bouleversements environnementaux et sociaux. Il implique d’abord des pollutions massives qui causent des dommages irrémédiables aux écosystèmes et mettent en péril de nombreux droits élémentaires des populations riveraines, notamment le droit à vivre dans un environnement sain et le droit à l’eau. En affectant grandement la quantité et la qualité de l’eau disponible pour les populations, les projets extractifs violent ce droit humain fondamental pour lequel la Fondation France Libertés lutte depuis plus de 15 ans.

Infographie Gaia Foundation Cycle de l'eau miné

Par ailleurs, l’accaparement et la privatisation des terres au profit de grands groupes économiques et au détriment des populations locales et de leurs activités de subsistance (pêche, agriculture, élevage, etc.) sont un bouleversement majeur qui remet en cause leurs modes de vie.

L’extractivisme n’est pas seulement une menace climatique et écologique à moyen-long terme du fait de sa production massive de gaz à effet de serre. La recherche et l’exploitation effrénées des ressources naturelles qui le caractérisent dévastent déjà, et de plus en plus vite, les derniers écosystèmes préservés et multiplient les « zones sacrifiées ». Ces territoires grossissent jour après jour les rangs des espaces convertis de force en zones exploitées pour alimenter le système économique marchand, sans que celui-ci ne soit débattu dans le cadre du consentement des populations qui n’ont pas la possibilité de les remettre en question.

L’extractivisme concerne les populations autochtones, les communautés rurales ou marginalisées des pays du Sud, mais peut également toucher toute communauté proche de ressources naturelles potentiellement exploitables. Dans les pays du Nord, on compte aussi des populations dont l’habitat, la santé, la culture et la vie même sont anéantis par l’extractivisme. En France, il est de plus en plus question de la réouverture des mines ou d’exploiter le filon « miraculeux » des gaz de schiste, dont on a vu les dégâts dans les pays qui se sont lancés dans l’aventure, les États-Unis en tête.

Stop à la criminalisation des défenseurs des droits humains et de l’environnement

Face aux nombreux bouleversements et aux conséquences dramatiques voire irréparables qu’entraine l’extractivisme, de plus en plus de résistances de la part des personnes affectées et de la société civile émergent. Partout dans le monde, des collectifs citoyens s’organisent pour protester contre l’installation de nouveaux projets destructeurs, faire fermer un site extractif particulièrement dangereux ou polluant ou encore attaquer en justice les multinationales coupables de graves abus contre les droits humains et environnementaux. France Libertés soutient ces luttes contre un modèle de développement prédateur et irresponsable mettant à mal l’effectivité des droits les plus fondamentaux.

France Libertés agit également pour dénoncer les répressions violentes totalement illégitimes de la part de nombreux États partageant des intérêts économiques avec les multinationales concernées. De nombreux citoyens sont menacés, torturés, assassinés pour avoir défendu leurs terres et tenté d’assurer la survie de leur famille.

Effectivité et application du consentement libre, préalable et éclairé.

Ces pratiques autoritaires posent la question fondamentale de la compatibilité du modèle extractiviste, régi par le profit et les intérêts financiers des multinationales, avec les droits humains et les principes de la vie démocratique. La prédominance des intérêts des entreprises sur celui des citoyens est flagrante. Elles sont encouragées par des États complices, à coup de répression, de droits bafoués et de lois permissives. Y compris en France, la population concernée est très rarement consultée. Lorsqu’elles ont lieu, les consultations relèvent trop souvent davantage d’une démarche d’information que d’une réelle écoute des citoyens et prise en compte de leur position.

En reprenant les droits inscrits dans les textes internationaux relatifs aux droits des peuples autochtones, notamment la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail et la Déclaration des Nations Unies pour les Droits des Peuples Autochtones, nous plaidons pour l’effectivité et l’application du consentement libre, préalable et éclairé des populations sur les projets qui menacent leurs modes de vie et leurs territoires. Ce consentement doit être pensé comme découlant de leur droit à l’autodétermination et doit être accompagné de la reconnaissance des droits fonciers des communautés rurales et autochtones.

Responsabiliser les entreprises vis-à-vis de leurs pratiques

L’insouciance et l’irresponsabilité avec lesquelles répondent les entreprises extractives aux catastrophes écologiques et sanitaires qu’elles engendrent, souvent causées par  le non-respect des normes ou le manque d’entretien de leurs installations, témoignent de leur mépris total pour les populations et leur environnement de vie. Elles jouissent d’une quasi immunité sur le plan juridique et bénéficient du vide législatif autour de la responsabilisation des entreprises extractives, des points cruciaux sur lesquels France Libertés souhaite porter l’attention de tous. Par ailleurs, elles instaurent une opacité autour de leurs activités qui rendent le contrôle particulièrement difficile. Depuis plusieurs années, de nombreuses associations militent pour des législations visant à contraindre juridiquement les entreprises et à les responsabiliser.

Quand ces entreprises reconnaissent leurs erreurs, elles dédommagent les victimes par des compensations financières mais ne sont quasiment jamais en capacité de réparer les dégâts environnementaux. Cet horizon de la réparation économique ou de l’arrangement à l’amiable en dehors du droit empêche de réfléchir sur le long terme à des solutions durables et participatives de gestion des ressources naturelles en amont et de poser la question de fond, celle du bien-fondé du modèle extractif.

Repenser notre rapport à la nature

Il convient en effet de s’interroger : l’extractivisme pour qui, pour quoi ? Il nous est présenté comme nécessaire, mais à quels besoins répond-il? Ces besoins en sont-ils vraiment ? Qu’apporte-t-il et à qui bénéficie-t-il?  France Libertés plaide pour la mise en place d’un réel débat sur le modèle extractif qui amènerait l’ensemble des acteurs à penser et à choisir en toute connaissance de cause leur modèle de développement.

A cet égard, les peuples autochtones et les nombreuses résistances qu’ils mettent en œuvre viennent remettre en question notre conception occidentale de la nature comme un réservoir de ressources exploitables. Ils nous invitent à sortir d’une vision purement marchande de la nature et à remettre l’idée de bien commun au cœur de notre pensée et de nos pratiques. Les peuples autochtones et le lien privilégié qu’ils entretiennent à la nature nous montrent le chemin d’une société post-extractive non basée sur la prédation des ressources et qui promeut un modèle de société permettant un équilibre retrouvé avec notre environnement. Ils nous apportent des clés pour repenser nos sociétés malades de l’extractivisme et de consumérisme.

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