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« Pour moi le bonheur, c’est d’être vivante, de participer à la vie, c’est d’être » : anniversaire de la disparition de Danielle Mitterrand

22.11.2015


Cet anniversaire intervient alors que nous traversons un moment de violence terrible, susceptible d’entrainer une remise en question de notre modèle de société.

Danielle Mitterrand s’est indignée tout au long de sa vie, portant sans cesse un message de paix et de justice. C’est cette énergie que nous choisissons aujourd’hui de porter, en puisant avec émotion dans ses écrits pour en extraire des éclairages toujours actuels sur notre société et des pensées porteuses d’espoir.

(Re)découvrez avec nous ces morceaux choisis issus du livre « Mot à mot, entretiens avec Yorgos Archimandritis » sorti en 2010.

B comme Bonheur

Les bonheurs fous, j’en ai développé les aléas et les corollaires en expliquant ce à quoi s’opposent les altermondialistes : les bonheurs qui visent le simple contentement de soi, la vanité, la tentation. Si les jeunes d’aujourd’hui sont persuadés que, s’ils ne deviennent pas riches, ils n’ont rien à attendre de l’avenir, à quel bonheur peuvent-ils aspirer ? Ils ont bien saisi que la richesse est concentrée dans quelques puissantes entreprises, que celles-ci ne partageront pas leur pouvoir et ne les propulseront pas sur la voie de cette forme de bonheur. N’est-il pas certain qu’ils le ressentent comme un aveu d’échec ? Allons-nous laisser se développer le sentiment déjà exprimé par des centaines de milliers de jeunes, à savoir qu’ils appartiennent aux dernières générations d’une espèce humaine en voie de disparition ? Ils se rassemblent, disent-ils, là où le ils trouvent un peu de chaleur humaine, où la musique, la danse et quelques expédients leur apportent la joie, le bonheur d’être ensemble.

La vie nous est donnée pour que nous l’honorions. Il est d’usage de la dire « sacrée » pour ceux qui ont le langage religieux. Mais elle est pour tous l’étincelle qui éclaire le monde. Sans elle, les ténèbres règneraient sur la planète, aussi belle soit elle, puisqu’elle ne serait ni vue, ni sentie, ni goutée, ni entendue, ni foulée, ni découverte.

Pour moi le bonheur, c’est d’être vivante, de participer à la vie, c’est d’être.

C comme Contre-Pouvoir

François Mitterrand disait : « tout pouvoir doit susciter son contre-pouvoir, autrement la tentation du pouvoir absolu est à craindre. Surtout lorsque les assemblées et les élus locaux sont en majorité proches du pouvoir ».

Le contre-pouvoir préserve la démocratie, c’est le pouvoir du peuple. C’est ainsi qu’en 1981 on a pu voir se créer une multitude d’associations, des groupes de citoyens se mettre en place, des mouvements de pensée se réanimer, des radios libres se conforter… France Libertés y trouva sa place. A l’échelle mondiale, c’est le rôle que se sont donné les altermondialistes.

Cette participation populaire, c’est la preuve d’une maturité citoyenne, d’une prise de responsabilité du peuple dans la conduite des décisions politiques. Elle exprime sa vigilance tout en soutenant le pouvoir qu’elle a mis en place. Une bonne intention gouvernementale peut se heurter à l’incompréhension de ceux à qui elle s’adresse. Un contre-pouvoir admis n’a pas besoin de crier dans la rue ou de manifester sa colère. Une démocratie digne de ce nom offre à la discussion toutes les structures utiles. Leur ambition n’est pas la quête du pouvoir puisqu’ils y sont associés. Une démocratie bien comprise donne le pouvoir au peuple par ses représentants élus. Le gouvernement en est le chef d’orchestre et le Président donne le la, en faisant appliquer les mesures sur lesquelles il s’est fait élire.

Il ne faut pas confondre contre-pouvoir et opposition. Je viens de décrire le rôle constructif du premier qui est tenu par celui qui nourrit les mêmes objectifs que le pouvoir. L’opposition, elle, n’a de cesse d’abattre ce pouvoir pour en reprendre les rênes et gouverner selon ses vœux et ses pratiques. Aujourd’hui, la confusion trouble tant les esprits que l’opposition, quelle qu’elle soit, ne présente plus d’idées, mais s’attaque plus volontiers aux personnes qui aspirent à se mettre sur le devant de la scène. C’est ainsi que ce déballage de vies privées a détourné le peuple de la politique dont il ne distingue plus les buts.

Libre des contingences politiques, financières et économiques internationales qui lient les chefs d’Etat et leurs gouvernements respectifs, le contre-pouvoir lui, entretient des échanges solidaires entre les peuples. Pour l’avenir, ce sera un gage de paix que nous nous efforçons de maintenir.

Aujourd’hui en France, il n’y a plus de contre-pouvoir admis. La stratégie d’ouverture qui aurait pu s’y substituer est une parodie. La voix unique qui entonne les diktats de la pensée unique n’est contrariée que par les vociférations de la rue. Quelques couacs sont vite étouffés. Jusqu’à quand ?

L comme Laïcité

La crise qui aurait pu éveiller les consciences et interroger l’entendement n’a rien apporté en sagesse. Voici un état des lieux instructif sur l’incapacité et le manque de volonté politique pour proposer une autre solution ou chacun, selon les options, trouve sa place, organise son environnement, fait usage de la part qui lui est dévolue sans léser son prochain.

Faudra t’il jusqu’à la fin des temps que l’Homme s’oppose à autrui pour se déterminer ?

L’humanité se réalise-t-elle seulement dans le choix d’un camp ? De nos jours ou certains d’entre nous sur la planète s’enflamment pour une société humaniste, respectueuse de son environnement, dans le refus du système économique et financier qui nous est imposé, nous avons le choix entre deux sociétés possibles : d’un côté les pauvres contre les riches, les exploités contre les puissants exploiteurs, les forces financières pour le profit contre le reste du monde, et de l’autre un monde pourtant riche des ressources communes pour la vie.

Le moment est venu de poser les règles du jeu pour la vie.

U comme Utopie

Que dit le dictionnaire pour le mot « utopie » ? « Construction imaginaire et rigoureuse d’une société qui constitue, par rapport à celui qui la réalise, un idéal total ». L’essentiel n’est-il pas d’avoir une vision claire de cet idéal et d’y tendre, de s’en rapprocher, même si sa réalisation doit attendre les générations suivantes ?

Si vous voulez en savoir plus sur les mots de Danielle Mitterrand,
vous pouvez regarder l’interview qu’elle avait accordé à la Fnac à l’occasion de la sortie de ce livre en 2010
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